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EXPLORATIONS DANS LE JURA VAUDOIS


GLACIERE DE CORRENTANAZ


Glacière du Pré de Saint-Livres


Description

Géologie

Remplissages

Historique

Dangers

Matériel

Bibliographie


Cette cavité se trouve au milieu du Pré de Saint-Livres (commune de Bière) et son vaste orifice entouré d'une couronne de sapins est bien visible au milieu du pâturage.

Description
Développement  :  104m Dénivellation  :  -45m

Entonnoir d'environ 50 mètres de diamètre dont le pourtour boisé par des sapins et des arbustes est ceinturé par une clôture et un muret. Dans la partie sud, un portail protège le départ d'une sente avec une petite échelle en bois, des marches taillées et une barrière métallique qui permet de rejoindre une échelle fixe en acier. En descendant sans effort sur cette dernière on accède alors au sommet du glacier qui se prolonge par une longue pente, mais cette dernière ne se présente pas toujours de la même façon.

En période estivale et en automne, il n'y a en effet plus vraiment de névé apparent car il est recouvert par une couche de terre sur une grande partie de la descente. En période hivernale ou au printemps, et suivant les conditions météorologiques, on peut alors trouver cette fois de la glace vive. De toute façon, la dernière partie est quant à elle la plupart du temps gelée. Une corde est donc indispensable et dans cette dernière partie il faut desendre sur la gauche car droit devant le névé se termine par un ressaut où une chute serait fatale.

A la base de cette pente du glacier, on prend pied sur un éboulis avec certains blocs très instables. En face, et sur la gauche, une galerie percée de deux cheminées permet de remonter le lit d'un petit ruisseau jusqu'à un passage impénétrable. Dans la partie droite (nord), une autre galerie s'achève une dizaine de mètres plus loin par une trémie. Enfin, il existe encore quelques courts passages qui permettent d'accéder sous le glacier.



Géologie

Calcaires du Portlandien.



Remplissages

La Glacière de Correntanaz est la plus importante du Jura vaudois par son volume de glace qui était estimé à 3500 m3 en 1960. Du point de vue scientifique, c'est une glacière dite "statodynamique", car la glace se forme de deux façon différente qui sont les suivantes :

1) Glacière dynamique : Chaque année, une nouvelle couche de neige vient s'ajouter au volume du glacier, puis se cristallise progressivement et devient glace. On observe ainsi différentes "couches" (strates) de glace séparées par des niveaux avec accumulation de débris, (humus, brindilles, etc.) qui correspondent au périodes d'été.

2) Glacière statique : Contrairement au mode de fonctionnement précédent, la glace est formée par le gel et le regel des eaux d'infiltrations et de condensation. Cette glace est plus vitreuse et il n'y a pas de strates d'éléments extérieurs (humus, ...).

Depuis la fin des années 1980, on a constaté par ailleurs une diminution du volume de glace par le fait que les hivers ont été moins rudes à cause du réchauffement du climat.

[ Evolution du volume de glace ]

Pour terminer ce paragraphe on peut encore signaler que la glace a été très tôt exploitée, mais au début et comme dans d'autres glacières du canton, peut-être uniquement pour alimenter les abreuvoirs à bétail (en été l'eau est rare). Ensuite, pendant une période qui s'étale du 19ème siècle au début du 20ème siècle, l'exploitation a été plus importante bien que l'extraction se fasse encore de façon artisanale. Lors des dernières années, la glace était stockée au village de Bière, puis vendue aux brasseries lausannoises.

A l'heure actuelle les seuls vestiges de cette exploitation sont des anneaux en fer scellés dans la paroi de gauche, des morceaux de ferrailles à la base du glacier et si elles y sont encore, des vieilles chaussures cloutées. Comme la partie d'entrée était équipée d'échelles en bois, il ne reste par contre aucune trace de cette installation.



Historique

Connue depuis de nombreuses générations elle est aussi la première caverne mentionnée dans la littérature vaudoise puisqu'en 1737 Seigneux de Correvon la décrit en ces termes :

" (...) Au milieu des bois d'une assez haute montagne est une ouverture étroite, qui doit conduire en se dévalant dans la grotte dont nous parlons. L'avenue n'est pas belle; elle est perpendiculaire, et d'une hauteur assez considérable sur un grand sapin qu'on y a jeté au hasard, et dont le branchage sert d'escalier. Arrivé au fond, il faut battre le feu et allumer des flambeaux, pour se conduire dans plusieurs cavernes qui font comme les pièces de l'appartement. On y trouve souvent de la glace dans les plus grandes chaleurs (...) ".

Cette visite lui inspira en outre le poème que voici :

" Comme dans ce grand vilain trou
On va toujours sans savoir où;
Sûrs d'y tomber, plutôt que d'y descendre
Et qu'on voit au dessus de soi
Un roc toujours prêt à se fendre
Les curieux pourront s'attendre
D'y trouver tout autre que moi ".

Au 19ème siècle, les scientifiques vont trouver avec les cavernes un nouveau terrain d'études et les glacières ne vont pas échapper à leurs investigations. Celle de Correntanaz, qui était alors exploitée pour sa glace, sera notamment étudiée par Pictet (1822), Dulac (1822), Thury (1861), Browne (1865), Schwalbe (1886) et Fugger (1888).

En 1962, la section de Morges du Club Alpin Suisse (CAS) installa des échelles fixes en acier pour faciliter la descente jusqu'au sommet du névé (les anciennes en bois étaient inutilisables depuis plus de 50 ans). Quant à la topographie elle fut actualisée en 1985 par le GSL.

Actuellement, un panneau d'information a été posé à l'entrée par l'ISSKA (avec topo du GSL).


Dangers

Chaque année de nombreux randonneurs ne résistent pas à l'envie de descendre au fond de la glacière pour admirer les lieux. Si la plupart d'entre eux le font avec prudence, nous en avons vu qui ne se doutaient pas des dangers. Sans tenir compte d'une glissade depuis le côté nord de l'entonnoir d'entrée qui se transformerait à coup sûr en une chute fatale (ce cas est vraiment hypothétique), il y a deux autres dangers qu'il ne faut pas sous estimer et qui sont :

En période hivernale et aux printemps, la glacière est parfois joliment décorée au plafond par des stalactites de glace dont certaines peuvent avoir des dimensions respectables. C'est très joli, mais en prendre une sur la tête pourrait provoquer plus qu'un mal de crâne !

La descente de la pente du glacier semble facile si ce dernier est recouvert d'humus, mais en réalité la dernière partie est presque toujours en glace vive et une glissade peut alors avoir de fâcheuses conséquences car au bas de la pente il y a un ressaut de plusieurs mètres.



Matériel

Casque obligatoire. En période estivale, le sommet du névé est facilement atteignable, mais ensuite il faut une corde de 50-60 m que l'on fixera à la grosse échelle et du métériel pour s'assurer (baudrier, descendeur, bloqueur). En période hivernale, il faut souvent une corde supplémentaire entre l'entrée et le sommet du névé.



Bibliographie

Anon. (1900) : Grotte Glacée du Pré-St-Livres. - Spelunca Mémoire, 24(6) : 39

Aellen V. et Strinati P. (1975) : Guide des grottes d'Europe occidentale. - Delachaux & Niestlé, Neuchâtel, Paris : 316 p.

Albanesi C. (1942) : Course à la Glacière de St-Livres. - Revue Polytechnique, Genève, 938, : 3859-3860

Audétat M. (1961) : Essai de classification des cavernes de Suisse. - Stalactite, 4(6)

Audétat M. et Guignard J-P. (1962) : La spéléologie dans le Jura suisse, la Vallée-de-Joux et ses environs. - Actes du 2ème congrès international de spéléologie, Bari-Lecce-Salerno, 1, 5 au 12 octobre 1958 : 257-273

Audétat M., Christen D., Deriaz P., Heiss C., Heiss G., Luetscher M., Morel P., Perrin J., Wittwer M. et les contributions de Blant M., Chaix L., Perrin B., Pignat G. (2002) : Inventaire spéléologique de la Suisse, Tome 4, Jura vaudois partie ouest. - Commission de Spéléologie de l'Académie suisse des sciences naturelles, La Chaux-de-Fonds : 104-106

Baron P-J. (1969) : Spéléologie du canton de Vaud. - Editions V.Attinger, Neuchâtel : 546 p.

Browne G-F. (1865) : Ice Caves in France and Switzerland. - London, Longmans : 315 p.

Brulhart D. (1998) : Glacières du Jura vaudois. - Travail de diplôme, Institut de géographie, Université de Lausanne : 77 p.

Dulac J-A. (1822) : Glacières naturelles. - Annales de Physique et Chimie, Genève, S.2, 21 : 113-127

Dutruit J. (1991) : Glacière de Correntanaz. - Le Trou, 52 : 36-41

Fugger (1888) : Beobacht in den Eisenhöhlen. - Salzburg

Pictet A. (1822) : Glacières naturelles. - Bibliothèque Universelle, Genève, S.1, 20 : 261-284

Schneider C. (1964) : Glacière du Pré de St-Livres. - Les Alpes, chroniques, 40(8) : 182-183

Schwalbe (1886) : Ueber Eishöhlen und Eislöcher. - Berlin : 3-8

Strinati P. (1966) : Faune cavernicole de la Suisse. - Annales de spéléologie, Paris

Seigneux de correvon G. (1737) : Voyage fait à la fin de juillet 1737 dans les montagnes occidentales du pays de Vaud. - Mercure Suisse, Neuchâtel, 16 : 16-33

Thury (1861) : Etudes sur les Glacières naturelles. - Archives des Sciences Physiques et Naturelles, Genève, 10 : 97-153



Photographies



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